Au tennis, la balle doit-elle toujours revenir ?

La jeune sensation colombienne Camila Osorio, pendant son match contre l'Ukrainienne Elina Svitolina, à Monterrey, au Mexique (Tennis World).

Par Eric D’Alo 

Le tennis est le sport solitaire par excellence, mais encore faut-il pouvoir le partager avec quelqu’un. 

Sinon, la balle ne reviendra pas. 

OK.. Oui… Je sais… Le mur… 

Bien sûr, il y a le mur… 

Mais dialoguer avec de la brique est tout de même assez plat. N’est pas maçon qui veut. 

Le ou la partenaire est donc de mise afin que les échanges soient plus que des coups de raquette, mais bien un face-à-face, un partage, une sorte de communion. 

Bon, je vais loin avec ma communion. Loin de moi le désir d’injecter un quelconque effet littéraire dans ce billet de blogue… 

Les effets, ça sent mauvais. Il n’y a que l’authenticité de la plume qui compte. 

Allons-y avec le partage. Partager quoi au juste ? 

Le plaisir de frapper des balles ? Le bonheur du travail bien fait ? La réjouissance de l’échange parfait et cette satisfaction qui s’en dégage ? La bière après l’échange : la conversation ? 

La conversation tennistique… 

— Ouin, ça frappe fort. 
— C’est mon style de jeu. 
— Moi aussi. 
— Pas évident de conserver la constance et la puissance des coups. 
— Et mon service qui rentre une fois sur deux. 
— Oui, le service, c’est le travail d’une vie… 

 La conversation tennistique « geek »… 

— Je viens de te faire un Medvedev. 
— Hein ? 
— Bin oui, le service par en dessous. 
— … 
— J’me comprends. 

La conversation « bière-istique »… 

— Pis ? Comment tu vas ? 
— Des changements chez nous, mais ça se gèrent. 
— Ah oui ? 
— Ouin, pas évident, mais on était rendu là. 
— Pourvu que les enfants n’en souffrent pas. 
— Effectivement. Priorité numéro un… 

C’est bien beau tout ça, mais le ou la partenaire de tennis idéal-e, qui sera au rendez-vous chaque semaine, qui te relancera pour aller jouer, qui est de ton calibre ou un peu plus fort-e, qui est sympathique… Oui, sympathique. Entre les points, c’est la serviette, la gourde d’eau, la reprise de souffle et les informalités à bâton rompu… 

Mais comme Stromae le chante si bien dans Solassitude, une autre œuvre contrastée, où les opposés s’entrechoquent à travers des paroles graves et de la musique ironique : 

« Le célibat me fait souffrir de solitude/La vie de couple me fait souffrir de lassitude » 

Jouer seul, pratiquer son service, le mur, le lance-balle — lorsqu’on a les moyens —, mais se mesurer, c’est bien. 

Se mesurer, donc. 0-40 et hop ! Le bris de service d’entrée de jeu. Un peu plus tard, le bagel. 6-0, merde ! Bon, il doit trouver ça plate, ça doit être ennuyant, trop facile… 

La névrose s’installe. On se parle à voix haute, on regarde son camp. Mais quel camp ? Je suis seul, sur le terrain 11 du Stade IGA, à balancer toutes mes balles dans le bas du filet. 

Merde ! 

Respire… Ressaisis-toi… Ce n’est qu’un jeu. Mais la compétition, ça active quelque chose dans le corps, dans le cerveau. 

Les endorphines sont légion. Comme pendant la création. La dopamine, l’hormone du bonheur, prend sa place, pour un moment. Pendant et après. Mais peu de temps après, la grisaille revient au galop. 

La conversation bière-istique refait surface. 

Soupir… Soupir… Soupir… La lassitude et la solitude. Allez, on s’ouvre des bulles ? On met de la musique — le nouvel album de Stromae, naturellement, dans lequel il parle beaucoup de caca. Écoutez-le et vous saurez de quoi je parle. Ce mot revient plusieurs fois : 

« Tu verras, c'est qu'du bonheur/ Tu verras, c'est d'la joie/ Y a les couches et les odeurs/ Y a lеs vomis, les cacas et puis tout l'restе » 

Avec la musique ironique, c’est du bonbon…


Les bulles, Leylah en boira peut-être ce soir, mais contre Camila ce ne sera pas de tout repos. Monterrey n’a qu’à bien se tenir. 

Lundi, la routine reprend, mais le paradis du tennis également. Indian Wells. 

L’an dernier, Paula l’avait emporté contre Vika. Cette année, qui le soulèvera ? 

Et Bianca, y sera-t-elle ? La grande championne de 2019… 

Des questions, des questions, toujours des questions...

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